The text below is a summary of a talk I gave during a panel discussion at APIMU (workshop on computational thinking teaching) on June 2021, 7th. The original French version is appended.

Why is teaching computational thinking in primary schools important ?

“Computational Thinking” refers to a concept which has (re)appeared in the computing science community through a federative note written in 2006 by Jeannette Wing and published in the Communications of the ACM (Association for Computing Machinery), one of the oldest and widest science societies (the ACM has been founded in 1947 and has more that 100 000 members). This note had a large echo in the community, in particular it bas been translated in French by Pierre Lescanne in 2008 and published in SPECIF, the newsletter of the Société Informatique de France (French Computing Science Society). This awareness of computing science’s specificities paved the way, at an international level, to the opening of various computing science curricula (often supported by science societies): 2010 in the USA (curriculum developed by the Computer Science Teachers Association), 2013 in the United Kingdom (curriculum supported by the Royal Society), 2014 in Australia, etc. One may note in France, the publication in 2013 by the French Académie des Sciences of a report entitled “Teaching computing science in France - there is an urgent need not to wait any longer”. In this context, computational thinking refers to a set of competencies which are specific to computing science (in a non-exclusive manner, some of these competencies are also developed and mobilised in other areas). Computational thinking can be seen through its link with logics and computing. It allows for grasping the way computers can automate computing, or even thinking by extension. Computational thinking includes competencies related to digital representations of information, and the processing of these (using algorithms).

Computational thinking is useful for digital humanities in may ways, including in the way it helps understanding how information can be representated and processed automatically, thus to understand some specificities of data used by digital humanities. Digitising information is indeed using a particular writing system : binary encoding. We, as human beings, cannot fluently read this writing, we need a machine for this. Furthermore, we do not see the (electronic) sheet on which the information is written (this sheet is very often located somewhere in the cloud). Last but not least, this digital information can be copied identically almost instantly, and shared very rapidly as soon as machines are inter-connected. Helping citizens to grasp the consequences of this on our lives is also at stake when teaching computational thinking.

Currently, digital information is used as a black box by a wide part of the population. This usage keeps citizens dependent. As an illustration, here are a few relatively common situations, where skills related to computational thinking would be required. Electronic signature: how to make sure of who is the author of a given binary writing ? (this can be done by crypting the message (or part of it) using a specific key). Digital identities: when we use a voice-over-ip service with our smartphone, do we have two distinct accounts ? (usually yes). Culture: when we use digital pieces of work (such as digital books), these are protected by means of so-called DRM (Digital Rights Management), devices which prevent unauthorised people from reading the piece of work. In other words, one cannot read a given piece of work without authenticating her-himself. To perform this authentication, these pieces of work are often compatible with a limited set of readers. Back to audio tapes times, we would probably not buy a tape which could only be played on given players ?

As a conclusion, I would say that computational thinking, in our current society, belongs to fundamental knowledge, together with education to media and information, whose importance is not questioned any more. During a recent talk with two colleagues from the field of science of education, one of them was unsure about the benefits / dangers of promoting computational thinking in primary schools, as it would promote a given topic (computing science) over other topics / jobs. The other colleague answered: language (here French) is a major concern of primary school education, still school is not about teaching how to become a writer. I think it give a meaningful description of what teaching computational thinking is about: emancipate citizens, help them to be independent in the society, which overcomes the economic stake itself.

Pourquoi enseigner la pensée informatique à l’école ?

Les termes de “Pensée Informatique” sont (ré)apparus au sein de la communauté informatique par le biais d’un article fédérateur rédigé en 2006 par Jeannette Wing dans le bulletin de l’Association for Computing Machinery (ACM), l’une des plus anciennes et plus grandes sociétés savantes en informatique (l’ACM a été fondée en 1947 et compte plus de 100 000 membres). Cet article a eu un large écho au sein de la communauté, il a notamment été traduit en français par Pierre Lescanne en 2008 et publié dans SPECIF, le bulletin de la Société Informatique de France. Cette prise de conscience des spécificités de la discipline informatique s’est suivi d’un mouvement international d’ouverture de curriculums scolaires en informatique (souvent avec le soutien de sociétés savantes) : 2010 aux États-Unis (curriculum développé par la CSTA, l’association des enseignants d’informatique), 2013 au Royaume-Uni (curriculum défendu par la Royal Society), 2014 en Australie, etc. On peut noter en particulier la publication en France en 2013 d’un rapport de l’Académie des Science intitulé “L’enseignement de l’informatique en France - Il est urgent de ne plus attendre”. Dans ce cadre, la pensée informatique réfère à un ensemble de compétences caractéristiques de la discipline (de manière non exclusive, certaines de ces compétences sont développées et mobilisées par d’autres disciplines). La pensée informatique peut être vue via ses liens avec la logique et le calcul. Elle permet d’appréhender comment l’ordinateur permet d’automatiser le calcul, voire le raisonnement par extension. La pensée informatique inclut des compétences de représentation numérique de l’information, et de traitement de cette dernière (au moyen d’algorithmes).

La pensée informatique est utile aux humanités numériques, notamment en ce qu’elle aide à appréhender comment l’information peut être représentée et traitée automatiquement, et donc de comprendre certaines spécificités des données utilisées par les humanités numériques. Numériser l’information, c’est en effet recourir à un système d’écriture particulier : le codage binaire. Nous, êtres humains, ne savons pas lire cette écriture, il nous faut une machine pour cela. Aussi, nous ne voyons pas la feuille (électronique) sur laquelle est écrite l’information (elle se trouve bien souvent quelque part dans le “cloud”). Enfin, cette information numérisée est duplicable à l’identique quasi-instantanément, et peut être partagée très rapidement dès que les machines sont connectées entre elles. Aider le citoyen à en saisir les conséquences sur notre vie est aussi l’un des enjeux de l’enseignement de la pensée informatique.

Actuellement, un usage “boîte noire” du numérique est fait par une grande partie de la population. Cet usage place le citoyen en situation de dépendance. A titre d’illustration, voici quelques situations relativement courantes, pour lesquelles des compétences apparentées à la pensée informatique seraient nécessaires. La signature électronique : comment s’assurer de la personne à l’origine de l’information binaire qui nous est présentée ? (cela peut se faire par un chiffrement particulier du message). Les identités numériques : lorsque nous utilisons un système de visio-conférence associée à un numéro de portable, avons nous deux prestataires (contrats, identités), ou un seul ? (le compte auprès du prestataire de visio-conférence est généralement différent du compte du prestataire de téléphonie “classique”). L’accès à la culture : lorsque nous consommons des oeuvres numériques (livres numériques en l’occurrence), ces derniers sont protégés par des “DRM”, des dispositifs empêchant notamment la réutilisation de l’oeuvre en dehors d’un cadre prévu. Autrement dit, on ne peut pas lire l’oeuvre sans s’identifier. Pour cela, l’oeuvre n’est compatible qu’avec certains dispositifs logiciels. A l’époque des cassettes, aurions nous accepté d’acheter des cassettes lisibles uniquement par certaines marques de lecteurs ?

Pour conclure, je dirais que la pensée informatique fait partie, dans la société actuelle, de savoirs fondamentaux, au même titre que l’Éducation aux Médias et à l’Information, dont l’importance n’est plus à démontrer. Lors d’une discussion récente avec deux collègues chercheurs en sciences de l’éducation, l’une d’eux évoquait ses réserves quant au fait de promouvoir la pensée informatique à l’école, ce qui entraînerait la formation d’un grand nombre d’informaticien.ne.s au détriment d’autres professions. Ce à quoi, l’autre collègue a répondu : le français occupe une place importante dans le paysage des disciplines scolaires, l’école n’a pourtant pas pour but de ne former que des écrivain.e.s. Je crois que cela résume bien l’enjeu de l’enseignement de la pensée informatique : émanciper le citoyen, l’aider à prendre pleinement sa place dans la société, ce qui dépasse les seuls enjeux économiques.

Last update: 2021-07-01